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Petit déjeuner du Club Delville : « Croissance : reprise ou feu de paille? »

Posté par : Anne-Lise Belleut
Catégorie : News du Club

Delville Management, cabinet de management de transition premium et acteur de référence en France, a reçu jeudi 23 juin Jean-Marc Daniel, Economiste, professeur à l’ESCP Europe et chroniqueur chez BFM Business, au petit-déjeuner du Club Delville sur le thème : « Croissance : reprise ou feu de paille ? « 

Economiste réputé à l’esprit corrosif, Jean-Marc Daniel était l’invité du petit-déjeuner du Club Delville, en cette fin du mois de juin. Infatigable contempteur des politiques économiques menées depuis 40 ans par les gouvernements français successifs, le chroniqueur matinal de BFM Business a délivré un certain nombre de constats, avec la franchise qui le caractérise, sur la crise économique mondiale déclenchée en 2008 (subprimes) et sur les blocages français.
« Tout d’abord, je récuse le terme de crise, a-t-il lancé. Cette notion nous est rabâchée depuis des décennies. Or, en tant qu’économiste, je ne considère pas qu’il existe une quelconque normalité. L’essentiel est d’être en mesure de s’adapter en permanence aux aléas et aux mutations économiques et technologiques ». Selon Jean-Marc Daniel, de tout temps, les hommes ont résisté au changement et ont défendu des rentes, qui n’ont pu être mises à mal que grâce à la concurrence. « Les luddites – ceux qui s’opposent au progrès – comme les canuts au 19ème siècle, se sont toujours, en vain, opposés aux nouvelles technologies dont le développement est pourtant inéluctable », explique-t-il. Selon Jean-Marc Daniel, les rentiers et les luddites contemporains sont principalement concentrés dans l’Etat et dans la fonction publique. Il importe donc de s’y attaquer pour fluidifier l’économie et favoriser la croissance.

Priorité à la croissance plus qu’à l’emploi

Selon l’économiste, depuis quarante ans, chaque leader politique accède au pouvoir en affirmant solennellement « Ma priorité, c’est l’emploi », avant de devoir admettre son échec, quelquefois de façon spectaculaire, comme François Mitterrand en juillet 1993 qui déclara : « Contre le chômage, on a tout essayé. ». « En réalité, nos dirigeants n’ont presque rien essayé. Ils se sont contentés d’accroître la demande publique sans mettre en regard les recettes équivalentes, ce qui a eu pour conséquence d’accroître la dette publique de manière exponentielle », constate Jean-Marc Daniel. En 1975, la dette issue de la Deuxième Guerre mondiale a été effacée par l’inflation, mais depuis cette date, plus aucun budget n’a été équilibré. « Depuis 1976, l’enjeu des gouvernements a été l’emploi, alors qu’il aurait dû être le pouvoir d’achat, et donc la croissance, qui passe par l’acceptation de mutations économiques et de destructions d’emplois », souligne Jean-Marc Daniel qui juge infiniment plus cohérent le modèle allemand. « Nos voisins allemands ont proposé à leurs partenaires européens de s’associer à eux dans la construction d’une Europe économique où les ajustements reposeraient non pas sur la demande publique et les corrections de prix relatifs par l’inflation, mais sur l’investissement privé et la pression exercée sur les acteurs. Ils n’ont guère été écoutés ». Selon Jean-Marc Daniel, les élites économiques hexagonales sont persuadées que l’inflation d’aujourd’hui réduit le coût du travail, l’inflation de demain effaçant, comme par enchantement, la dette publique née de l’accumulation de déficits. « Espérer réduire le chômage d’aujourd’hui grâce à un endettement croissant au prix de l’inflation de demain est un pari dangereux », estime Jean-Marc Daniel.

Depuis 1978, la France prend solennellement des engagements envers ses partenaires européens, puis s’empresse de ne pas les respecter. Par exemple, elle signe le traité de Maastricht mais laisse filer son déficit public à 6% du PIB dès 1993. Elle adopte le pacte de stabilité et de croissance mais refuse de s’y soumettre… « Il est urgent de mettre fin à ces mauvaises habitudes » juge Jean-Marc Daniel qui estime qu’il faut prendre acte de la société de déflation dans laquelle l’Europe bascule et au sein de laquelle la croissance du pouvoir d’achat sera générée grâce à la baisse des prix liée à la concurrence et non, comme dans la société des années 60 reposant sur des monopoles, en augmentant les salaires. « Dans ce monde sans inflation, concurrentiel, ce seront les créatifs et les entrepreneurs qui prendront le pouvoir. Les jeunes auront dans leur carrière professionnelle davantage de clients que de patrons » estime-t-il.

S’agissant de François Hollande, si Jean-Marc Daniel salue ses premières intentions (50 milliards d’économies, volonté d’optimiser la dépense publique et de redresser les comptes), il regrette amèrement ce qu’il appelle « le matraquage fiscal » tant pour les ménages que pour les entreprises. Pour Jean-Marc Daniel, il est urgent d’instaurer une économie irriguée par la concurrence, dans laquelle l’Etat devra être un maître d’ouvrage et non un maître d’œuvre. « 50% des services publics peuvent être facilement privatisés ». « Les capacités de rebond de l’économie française s’amenuisent, s’alarme Jean-Marc Daniel. J’ai bien peur que les mouvements politiques extrêmes ne profitent de ce gâchis. La France recèle pourtant tellement d’atouts ».

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Bio de Jean-Marc Daniel

  • Né en 1954 à Bordeaux
  • Ancien élève de l’École Polytechnique, de l’ENSAE et de Sciences Po
  • Responsable de l’enseignement économique des élèves-ingénieurs du Corps des Mines et professeur d’économie à l’ESCP Europe
  • Chroniqueur au journal les Echos
  • Directeur de la revue Sociétal

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  • 8 leçons d’histoire économique (dernière édition en poche 2015)
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