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Le management de transition dans le secteur du luxe

Posté par : thomas
Catégorie : Actualités

Avec 25 années d’expérience dans le secteur du luxe, Alain Viot a occupé différentes fonctions de direction au cours de sa carrière. Il nous fait part aujourd’hui de son vécu.

Quelles sont les particularités du secteur du luxe ?

Dans le luxe, il faut considérer la marque comme le principal actif de la société. Cela veut dire que tout doit être au service de la marque avec une stratégie et un discours cohérent porté par l’ensemble des équipes, de la direction aux collaborateurs. Ainsi, parfois, on se retrouve dans des situations où les marques ont perdu leur âme: soit elles ont pris de mauvaises orientations, soit le discours devient trop compliqué, incohérent, et n’est plus perçu de façon positive par les clients. On arrive dans des situations de management de crise où il est nécessaire de redéfinir l’ADN de la marque, ses racines et donc son identité. À partir de là, on va pouvoir définir une stratégie de développement en s’appuyant sur les véritables bases de la marque. On arrive souvent dans une situation de management où il est nécessaire d’arrêter les dégâts, et de repartir sur des bases saines. Ce n’est pas facile de les définir, il y a tout un travail de réflexion, d’analyse, pour vraiment identifier tous les éléments qui constituent l’ADN de la marque, sa légitimité, et donc sa capacité à se différencier de la concurrence. Ce n’est pas forcément évident, mais il y a des méthodes pour pouvoir définir ces racines.

Pouvez-vous nous en dire plus sur ce qui fait l’identité d’une marque ?

La marque n’est pas juste quelque chose d’intangible. Il y a des éléments constitutifs qui font le prestige et la valeur de la marque. Je citerai deux éléments constitutifs de la marque, qui pour moi sont les plus importants en termes de création de valeur :

  • c’est en amont la qualité des produits. Cette qualité peut s’exprimer à travers un savoir-faire, souvent historique, ou à travers la créativité avec une création correspondant aux valeurs de la marque. C’est aussi le souci du détail, qui va faire la différence entre un produit de mass market et un produit de luxe. C’est la garantie du positionnement luxe d’une marque.
  • C’est en aval la relation avec les clients. La marque doit avoir la capacité à créer une relation une ambiance, un service, qui donnera envie au client de venir ou revenir. C’est le résultat du travail établi sur l’identité de la marque.

Tout ce qui est produit, communication, est un moyen d’expression de la marque qui doit être légitime et cohérent par rapport aux valeurs définies dans la marque.

Comment êtes vous parvenu à redresser la marque LLADRO ?

Quand la famille LLADRO a fait appel à moi, le moment était délicat pour la société. Il y avait le passage à la seconde génération. Les fondateurs étaient 3. C’était donc 3 familles et de nombreux cousins et cousines. Ils ont fait appel à moi en tant que DG pour repositionner la marque qui était en déclin, car elle n’avait pas su se renouveler par rapport à l’évolution du marché. Elle était en train de perdre sa clientèle, vieillissante, sans acquérir de nouveaux clients pour les remplacer, notamment aux Etats-Unis.
Le challenge du repositionnement de la marque était de définir l’ensemble des éléments constitutifs de la société de la marque. La base a été de s’appuyer sur l’ADN de la marque : le savoir-faire exceptionnel des artisans. L’idée était de s’appuyer sur ce savoir-faire mais de moderniser la marque par rapport aux attentes de nouveaux clients. J’ai crée le concept de beauté fonctionnelle. L’idée était de remettre le produit dans la maison, et pas uniquement dans un placard comme un produit de collection, qui n’avait pas sa place dans la maison de nouveaux clients. On a par exemple fait des lustres sublimes en mélangeant la fibre optique et la porcelaine. On a aussi développé une ligne de robinetterie et d’accessoires pour la salle de bains.

Les collaborateurs étaient-ils réceptifs au changement ?

Il y a eu un travail de réorganisation des équipes de façon à l’adapter à la nouvelle stratégie. Il y avait deux axes de redéveloppement. La première étape était de redimensionner la société en fonction de la situation et du potentiel à court terme de la marque. En ayant défini et établi ces nouvelles bases, on pouvait mettre en œuvre les éléments pour nourrir le redressement de la société. L’une de mes premières actions a été de recruter un nouveau directeur artistique qui puisse donner une nouvelle impulsion au travail des artisans. Le deuxième élément fondamental était l’ouverture de nouveaux marchés et de nouveaux clients. J’ai ouvert une filiale en Chine et une joint venture en Inde. Il y avait une relation riche entre les figurines de porcelaine de LLADRO et le marché indien.
En général, l’un des dangers est aussi la perception des dirigeants ou des fondateurs d’une marque, qui voient leur marque différente de ce qu’elle n’est vraiment. Cela débouche à un moment donné à des problèmes de gestion ou des problèmes de stratégie.

Pourquoi avoir intégré le marché indien ?

Cela faisait partie de l’ADN de la marque dans le sens où le travail artistique était fondé sur les sentiments de l’être humain et la religion. Avec le savoir-faire des artisans, on a réussi à exprimer tout le sens que représentaient les dieux auprès des Indiens.

Quelles ont été les grandes difficultés de ce repositionnement ?

C’est de gérer une crise à court-terme, sur le développement d’une marque à long-terme. Le principal problème est la gestion du temps : on est à la fois dans une situation difficile à court terme où on doit gérer le cash-flow, mais on doit aussi créer les conditions de renouvellement et de mise en œuvre de la stratégie.
Comment avez-vous réussi à le faire ?
L’un des principaux points est la communication. Si l’on veut mobiliser les équipes en interne et attirer de nouveaux prescripteurs ou clients, il faut communiquer sur la nouvelle stratégie, sur les nouveaux produits et sur les actions qui portent ce nouveau projet. Pour régler le cash flow, il fallait trouver des relais de croissance qui vont permettre de refinancer le développement à long-terme. C’est pour ça qu’on s’est développé sur les marchés émergents, de façon à compenser les difficultés sur le marché américain.

Quels sont les contextes d’intervention du manager de transition ?

J’ai été approché par Anthony Baron, il y a quelques années à Londres. Il m’a présenté son activité. A l’époque, il était en phase de création de cette activité. Avec Patrick, je l’ai trouvé particulièrement motivé, intéressé et souhaitait apporter des idées neuves sur ce métier. Depuis, je suis resté en contact avec Anthony et c’est à la suite de ça qu’il m’a proposé d’intégrer le Club Delville.

Pourquoi vous avez intégré le Club Delville ?

L’idée m’a plu. Cette idée de partage de valeurs, d’hommes et de femmes d’horizons différents est très enrichissante.

Quelle est la valeur ajoutée de Delville Management ?

Le discours et la méthode. Les valeurs véhiculées, leur projet, leur aventure sont extrêmement intéressantes.