Delville Management organisait, le 18 octobre 2017, un petit-déjeuner autour du build-up, afin d’échanger expériences et bonnes pratiques entre professionnels rompus à l’exercice.
Quand les perspectives de croissance sont de nouveau bien orientées, l’appétit des entreprises pour les opérations d’acquisition et de consolidation repart, mécaniquement, à la hausse. Au départ, l’objectif de l’opération doit être clairement défini, afin de s’orienter vers la bonne cible. Plusieurs scénarios sont possibles. Lorsqu’une entreprise se situe en phase de croissance, elle peut se permettre de prendre plus de risques. Le build-up est alors un formidable accélérateur pour son développement. « Dans un marché plus atone, l’objectif d’un build-up sera plutôt de renforcer l’entreprise », explique Stéphane Pham, CEO du groupe France Elevateur. Lorsque le secteur d’activité est particulièrement tonique, un groupe peut aussi procéder à plusieurs opérations pour prendre position sur différents segments du marché. L’acquisition d’une nouvelle entité constitue ainsi une opportunité pour diversifier ses offres, son implantation géographique et donc ses clients. Une fois la cible identifiée, au moment de se lancer dans les grandes manœuvres, il y a toujours une part d’intuition, tant sur la situation du marché que sur le management de la cible », note Alban Neveux, Managing Director au sein du cabinet de conseil Advention.
Toute opération de build-up s’accompagne d’un certain nombre de contraintes, notamment en droit de la concurrence, si la cible a la même activité que l’acquéreur. « Lorsque le build-up est conduit par un fonds d’investissement qui a de la dette sur le dos, les conditions à remplir peuvent être très contraignantes : une fois sur deux on n’est pas dans les clous », prévient Frédéric Bucher, Associé-Gérant au sein du cabinet d’avocat de STC Partners. Dans cet éventail de règles à respecter, la clé est d’anticiper. Comme le suggère Johann Le Duigou, Associé au sein du fonds d’investissement NiXEN Partners : « Le build-up s’inscrit dans une stratégie globale de développement de l’entreprise.
« Ces transformations sont autant d’éléments qui font qu’une connaissance approfondie des enjeux de ce secteur, de la rigueur et un grand pragmatisme sont primordiaux pour un Manager de Transition évoluant dans ce domaine. »
Il faut travailler au maximum en amont pour faciliter l’opération. Par exemple, il vaut mieux faire entrer un partenaire financier avant d’effectuer le build-up. Procéder à deux opérations en même temps sera trop risqué. » La vision du build-up doit être communiquée habilement auprès des partenaires, le management doit l’inscrire dans la stratégie globale de l’entreprise et susciter l’adhésion des équipes, voire des fournisseurs et des clients. Pour Frédéric Bucher, « il faut profiter des rapports d’audit que demandent les banques pour bien connaître la cible. Il faut les utiliser comme un levier positif, pour faire de ces étapes incontournables des éléments de marketing et de communication auprès des banques ».
Même si une opération de build-up implique un calendrier précis, avec une création de valeur à un horizon donné, le niveau d’intégration, lui, peut varier d’une opération à l’autre. « Il n’y a pas de recette magique ni de logique absolue. Tout dépend si le groupe est très centralisé ou s’il possède des filiales autonomes. Dans le second cas, on peut décider de garder le nom de l’entreprise cédée », explique Alban Neveux. C’est notamment le cas lorsqu’un groupe veut garder une coloration locale à travers ses différents pays d’implantation. Mais « le plus souvent, l’intégration se fait à marche forcée. Les build-up où la marque est conservée sont des cas particuliers », selon Stéphane Pham.
Plus largement, le build-up doit être mis à profit pour une réflexion approfondie sur la stratégie. « Le recours à un cabinet de conseil ayant une approche structurée m’a été très précieux. Il agissait comme un miroir de ce que je pouvais faire. J’étais un peu comme un cow boy, j’avais besoin de quelqu’un qui me ralentisse. […] Nous avons réalisé 30% de notre croissance de façon organique et 70% en build-up », explique Stéphane Pham, évoquant son expérience de CEO chez Trigo, entreprise de gestion et de contrôle de la qualité, durant laquelle il a procédé à de nombreuses opérations de build-up. On apprend en marchant et la méthodologie vient avec le temps. L’expérience permet de mieux planifier les différentes étapes. « Au bout du troisième build-up, ma ligne de conduite a été d’établir un vrai contact humain avec le management en place et de partager avec lui la stratégie et les objectifs. Ensuite, on définit le rôle précis du cédant. Le plan d’intégration arrive seulement en troisième dans la liste. Ma première intégration a pris trois ans. Avec des objectifs plus clairs et cette méthodologie, elle n’aurait pris qu’un an »note Stéphane Pham.
Le management joue un rôle essentiel pour réussir les intégrations. « Le rôle du fonds est d’abord celui d’un partenaire financier, il questionne le management. Mais s’il fait tout, cela peut engendrer des dangers », note Johann Le Duigou. L’idéal est donc de fonctionner en binôme. « Il faut laisser au management la préparation de l’intégration, en partenariat avec le management du cédant. Le fonds s’occupe du pilotage financier et le management doit se projeter sur l’intégration de la cible, de son management comme de son business. A lui de vendre la cible au fonds d’investissement », selon Frédéric Bucher. Pour éviter un grand nombre d’écueils, « la solution consiste souvent à faire remonter l’actionnariat du cédant dans la holding », suggère Stéphane Pham. Pour Johann Le Duigou, le management contribue énormément à la réussite des opérations de croissance externe, à condition de savoir l’écouter. « Il faut déceler les signaux faibles pendant l’étude d’un projet d’acquisition. Lors du bilan, on se rend compte que les éléments compliqués de l’opération ont souvent été évoqués en amont. Lors des réunions de préparation, ces éléments n’ont malheureusement pas été assez valorisés. Sans confiance ni l’écoute, des marches sont ratées », estime-t-il. Les équipes sont aussi là pour alerter sur des décisions peu judicieuses. « Il ne faut pas basculer de la persévérance à l’obstination. Je n’ai pas connu d’opération réussie où le dirigeant a eu raison seul contre tous. Il faut identifier les freins externes et les dépasser. Mais quand en interne les avis divergent, il y a un vrai risque. » Alors, quel est le rôle du dirigeant dans une opération de build-up ? Selon Stéphane Pham, il faut « inspirer la confiance et la conserver » et non avancer bille en tête.
Pour évaluer la réussite de ces opérations, il faut attendre en général au moins deux ou trois ans. Selon Johann Le Duigou, elle s’illustre à travers des critères organisationnels : « Est-ce que l’équipe dirigeante de la cible est présente au sein du management de la nouvelle entité ? Les groupes de travail et les équipes sont-elles mixées ? Le savoir-faire de la cible a-t-il permis de faire aboutir des projets ? Le process budgétaire, le référentiel comptable et l’évaluation des équipes sont-ils les mêmes ? » En cas de réponse positive à ces questions, l’opération a toutes les chances d’être réussie, à condition que la rentabilité de l’entreprise se soit améliorée. Lorsque le build-up a permis l’émergence de nouvelles offres, qui n’auraient pu exister avant l’intégration, le succès est souvent au rendez-vous.
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