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Fidélisation du personnel et réduction des coûts

Posté par : thomas
Catégorie : Actualités, Témoignages

Patrick Kaczmareck, 30 ans d’expérience dans les fonctions RH.

Il devient DRH en 1993. Puis en 2011, il crée son entreprise DACREMONT Consulting, Management de transition et conseil en développement des ressources humaines en Europe. Il nous livre aujourd’hui son expérience passée dans un centre d’appels.

Quel était le degré de fidélité du centre d’appels dans lequel vous étiez ?

Le taux de turnover, élément majeur dans la gestion de centre d’appels, était de 18%. Ce taux était déjà moins élevé que le taux du marché, situé entre 22 et 25%, mais c’était encore trop. L’objectif commun était d’atteindre un taux de 6%, proche du niveau des entreprises des autres secteurs.

Pourquoi vouliez-vous baisser le taux d’attrition ?

Nous avions calculé que 1% de turnover en moins pour un site de centre d’appels de 400 personnes équivaut à une perte de 270 k €. Ces 270 000€ représentent les coûts de recrutement pour remplacer les personnes parties, les coûts de formation, qui peuvent varier entre une et trois semaines en fonction du produit du client, plus les coûts de sous-production. En effet, un opérateur de vente en ligne n’est pas opérationnel immédiatement. En fonction de la complexité du produit à vendre, la sous-production peut varier entre une et trois semaines. L’économie finale a été aux alentours de 9 M € sur une période de 2 ans.

Quelles étaient les raisons de ce taux élevé ?

Deux raisons provoquaient le turnover. La première était que la politique salariale était trop statique. Les employés étaient jeunes, d’une moyenne d’âge de 26 ans. L’horizon en termes d’évolution de salaires est donc court. Il est de 9 mois sur les sites européens, et de 6 mois au Maghreb. Le deuxième point était le style de management. Pour ces jeunes, il se perçoit non pas par le directeur de site ou le responsable de site, mais par le manager de proximité. Il était dit que « 90% des managers viennent du terrain ». Mais en réalité, ces managers ont été téléopérateurs et sont devenus tout d’un coup chef d’équipe, sans aucune formation. C’est un métier qui génère du stress. Les managers de proximité reversaient donc leur stress sur les agents de production qu’ils accumulaient avec leur propre stress. Il fallait trouver une réponse salariale et managériale.

Quelle fut la réponse salariale ?

Sur les salaires, il fallait donc montrer qu’il y a une revalorisation salariale au bout de 6 mois ou 9 mois avec une politique de gestion un peu plus dure. En revanche, nous partions du principe que s’ils sont dans l’entreprise c’est parce qu’ils sont bons. Et qu’il faut donc les récompenser. Plus ils restent, plus ils sont bons et plus il faut les récompenser. En parallèle, des tests de connaissance sont régulièrement organisés et les résultats de vente sont mesurés. Si les objectifs étaient atteints, au bout de 9 mois, les personnes voyaient leur salaire augmenter de 2,5%, hors révisions annuelles de salaire. Pour le Maroc, l’augmentation était de 4% tous les 6 mois.

Quelle fut la réponse au niveau managérial ?

Le principe était pris de ne plus nommer des managers au hasard. On allait sélectionner et former les managers sur la base de leur propre volontariat. On a donc mis en place un programme de formation avec un concours d’entrée. Les personnes acceptées étaient sûres qu’à la sortie du programme, elles auraient un poste de chef d’équipe. En outre, cela permet de mettre en place une gestion prévisionnelle un peu plus sérieuse, puisque l’on demandait aux responsables de sites de s’engager sur les besoins de chefs d’équipe l’année prochaine. Les personnes acceptées au concours suivait un programme de développement unique en partenariats avec l’entreprise, des consultants externes, l’intervention d’organisations syndicales, l’université de Lyon, la VAE, le DIF et un e-learning. Au bout d’un an, cela débouchait par l’obtention d’une licence d’Etat reconnue. De plus, même ceux qui n’étaient pas dans le programme avaient des attentes en bénéficiaient indirectement, puisque le management s’opérait de meilleure manière et faisait tâche d’huile. Nous avons aussi mis en place une politique de communication avec un arbre d’évolution présentant différents chemins de carrières en fonction des compétences nécessaires dans l’entreprise

Combien coûtait ces mesures ?

La formation coutait environ 450 000€, mais grâce aux partenariats nous n’en avons payé que 20%. La politique salariale se faisait sur trois ans. En effet, nous sommes dans un secteur d’activités où les personnes quittent l’entreprise au bout de 3 ans, quelque soit la politique de l’entreprise. Et mettre des centaines de milliers d’euros dans une politique salariale plus généreuse n’est plus un problème quand on se rend compte des économies générées. La baisse du taux d’attrition compensait largement la politique salariale et de développement des managers. Au final, nous avons économisé plus de 9 M€ et atteint le taux de 6% de turnover. Nous ne sommes pas habitués à entendre parler de chiffres en RH… La quantification et les chiffres dans la fonction RH sont possibles et permettent beaucoup de choses. On ne peut pas faire de gestion et de développement RH sans les chiffres, car sinon c’est de la poésie. Mais il est vrai que ce n’est pas un discours classique dans les RH. On avait mesuré la période moyenne de sous-production d’un téléopérateur. C’est quelque chose qui n’avait jamais été fait. Établir le coût du départ des salariés, même avec une idée approximative, nous permettait de se rendre compte de l’importance des gains qu’il était possible de réaliser. La question initiale était de se dire que cela coûtait très cher. Nous n’étions pas totalement sûrs du résultat final. C’était un pari sur l’avenir que la direction a su prendre car elle fut convaincue par les économies de coût calculées.